Cour d'appel de Nouméa, 24 avril 2014

Cour d'appel de Nouméa, 24 avril 2014

10/00568

COUR D'APPEL DE NOUMÉA 67
Arrêt du 24 Avril 2014
Chambre Civile
Numéro R. G. : 10/ 568
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 12 Juillet 2010 par le Tribunal de première instance de NOUMEA (RG no : 10/ 1087)
Saisine de la cour : 07 Octobre 2010

APPELANT
LA SARL SORENA, prise en la personne de son représentant légal
Dont le siège social est sis 55 Avenue du Maréchal Foch-BP. 244-98845 NOUMEA CEDEX Représentée par Me Sophie BRIANT de la SELARL BRIANT, avocat au barreau de NOUMEA

INTIMÉS

LA CONFEDERATION NATIONALE DES TRAVAILLEURS DU PACIFIQUE, dite CNTP, prise en la personne de son Président en exercice Dont le siège est sis à la Maison des Syndicats-3 rue Unger-Vallée du Tir-BP. 14586-98803 NOUMEA CEDEX
Représentée par Me Laurent AGUILA de la SELARL AGUILA-MORESCO, avocat au barreau de NOUMEA
Mme Santianré X..., es-qualité de déléguée syndicale de CSTNC née le 03 Février 1973 à NOUMEA (98800)
demeurant 98 800 NOUMEA
L'UNION SYNDICALE DES TRAVAILLEURS KANAKS ET EXPLOITES, dite USTKE, prise en la personne de son Président en exercice
Dont le siège est sis 2 rue Ali Raleb-Vallée du Tir-BP. 4372-98846 NOUMEA CEDEX
L'USOENC, prise en la personne de son Président en exercice
Dont le siège social est sis à la Maison des Syndicats-3 rue Unger-Vallée du Tir-BP. 2534-98846 NOUMEA CEDEX

LA COGETRA-USCGINC, prise en la personne de son Président en exercice
Dont le siège social est sis 2 rue Philogène L. des Jardins-Doniambo-BP. 1612-98845 NOUMEA CEDEX

COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 03 Avril 2014, en audience publique, devant la cour composée de :
M. Yves ROLLAND, Président de Chambre, président,
M. Jean-Michel STOLTZ, Conseiller,
M. Christian MESIERE, Conseiller, qui en ont délibéré, sur le rapport de M. Yves ROLLAND.

Greffier lors des débats : M. Stéphan GENTILIN

ARRÊT :- contradictoire,
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,
- signé par M. Yves ROLLAND, président, et par M. Stéphan GENTILIN, greffier, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.
***************************************
PROCÉDURE DE PREMIÈRE INSTANCE

Par requête déposée le 1er juin 2010 la SARL Sorena, exploitante d'un commerce de restauration rapide à l'enseigne « Mc Donalds » à Nouméa, saisissait le tribunal de première instance de Nouméa sur le fondement de l'article Lp 323-29 du code du travail de Nouvelle-Calédonie afin d'obtenir l'annulation de la désignation de Mme Santiaré X... en qualité de déléguée syndicale de la Confédération Nationale des Travailleurs du Pacifique (CNTP) et l'annulation corrélative de la section syndicale de ce même syndicat.
A l'audience du 14 juin 2010 la SARL Sorena se désistait de sa demande d'annulation de la désignation de Mme S. X... en qualité de déléguée syndical au vu d'un courrier explicatif désignant celle-ci en qualité de représentante syndicale mais maintenait ses autres demandes.
La CNTP admettait sa création récente mais demandait néanmoins au tribunal de reconnaître le bien-fondé de la création d'une section syndicale et de la désignation d'un représentant syndical pour les syndicats ayant moins de deux ans d'existence.

C'est dans ces conditions que par jugement rendu le 12 juillet 2010 et qualifié « en dernier ressort » le tribunal de première instance de Nouméa donnait acte à la SARL Sorena de son " désistement relatif à l'annulation de Mme S. X... en qualité de déléguée syndicale " et déboutait la société du surplus de ses demandes après avoir relevé qu'il ne pouvait annuler la création d'une section syndicale puisqu'une telle sanction n'était pas prévue par le code du travail local.

PROCÉDURE D'APPEL
Après avoir dans un premier temps formé un pourvoi en cassation à l'encontre de cette décision puis s'en être désistée, la SARL Sorena interjetait appel par requête reçue au greffe de la cour le 7 octobre 2010.
Les intimés n'ayant pas conclu, la cour d'appel, par arrêt avant dire droit rendu le 27 octobre 2011, ordonnait « qu'il soit sursis à statuer au fond jusqu'à la décision de la Cour de Cassation devant intervenir sur le pourvoi formé contre l'arrêt du 28 février 2011 » rendu dans une affaire similaire.

Par conclusions de reprise d'instance du 10 avril 2013 et conclusions en réponse du 18 juillet 2013, écritures auxquelles la cour se réfère pour le détail de l'argumentation et des moyens, la SARL Sorena demande qu'il lui soit donné acte de sa reprise d'instance après que la Cour de Cassation ait statué par arrêt du 15 janvier 2013, conclut à la recevabilité et au bien-fondé de son appel, à l'infirmation du jugement déféré et demande à la cour, statuant à nouveau de :
annuler la section syndicale constituée par la CNTP au sein de la société et partant la nomination de Mme S. X... en qualité de représentante syndicale ;
condamner la CNTP à lui payer au titre des frais irrépétibles, en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie, 300 000 Fr Cfp pour ceux exposés en 1ère instance et 250 000 Fr Cfp pour ceux exposés en appel ;
la condamner aux entiers dépens de 1ère instance et d'appel.

Elle fait valoir pour l'essentiel à l'appui de ses demandes que :
- Le jugement ayant été improprement qualifié en dernier ressort et sa notification mentionnant comme voie de recours le pourvoi en cassation, ces mentions erronées n'ont pas fait courir le délai d'appel et son appel est donc recevable ;
- La seule question qui est posée à la cour est relative à la constitution d'une section syndicale par la CNTP alors qu'à la date de cette constitution le syndicat intimé n'avait pas deux ans d'ancienneté et n'était représentatif ni au niveau de l'entreprise, ni au niveau de la Nouvelle-Calédonie, ni au niveau interprofessionnel.

Aux termes de ses conclusions reçues au greffe les 21 juin et 30 septembre 2013 la CNTP conclut à titre principal à l'irrecevabilité de l'appel, " aucune demande de nullité de la notification du jugement dont appel n'étant sollicitée ", subsidiairement demande à la cour de le déclarer non fondé et de condamner la société à lui payer 200 000 Fr Cfp en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie outre les dépens.

Elle soutient principalement à l'appui de ses demandes que :
- Aucune juridiction ne s'étant " jusqu'alors prononcée sur la validité de la notification, celle-ci s'impose de sorte que la société sera de facto déclarée irrecevable en son appel " ;
- La question des deux ans est désormais inopérante puisqu'elle remplit désormais, depuis mai 2012, l'obligation d'ancienneté prévue par les textes de sorte qu'à ce jour rien ne justifie que la cour prononce l'annulation de cette section syndicale, le droit syndical étant un principe constitutionnellement protégé.

Les ordonnances de clôture et de fixation sont intervenues le 26/ 12/ 2013.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la qualification du jugement déféré.

L'article Lp 323-29 du code du travail de Nouvelle-Calédonie ne prévoyant d'exception à l'ouverture du droit d'appel que lorsque le tribunal de première instance connaît des " contestations relatives aux désignations des délégués ou représentants syndicaux ainsi qu'aux élections professionnelles ", le jugement statuant dans un litige portant sur la création d'une section syndicale et la nomination d'un représentant syndical est susceptible d'appel.
C'est donc à tort que le jugement rendu par le tribunal du travail le 5 janvier 2010 a été qualifié « en dernier ressort ».

Sur la recevabilité de l'appel.
La mention erronée dans l'acte de notification d'un jugement de la voie de recours ouverte, de son délai ou de ses modalités a pour effet de ne pas faire courir le délai de recours.

Dès lors que la notification du 13 juillet 2010, dont toutes les parties reconnaissent la concordance avec le jugement rendu et dont personne ne demande la nullité, mentionnait comme voie de recours le « pourvoi en cassation », elle n'a pas fait courir le délai d'appel et celui-ci est donc recevable.

Sur le fond.
Il résulte des articles Lp 322-1 et Lp 322-12 du code du travail de la Nouvelle-Calédonie qu'un syndicat disposant d'une ancienneté minimale de deux ans peut être reconnu représentatif dans l'entreprise et peut y créer une section syndicale.
Il résulte des pièces communiquées que par courrier du 20 mai 2010 la CNTP prise en la personne de son président M. Gérard Z...avisait « M. Le directeur de McDonald's BP 244 98 845 Nouméa CEDEX » de la « mise en place d'une section syndicale et de la nomination d'une représentante syndicale » en la personne de Mme S. X... au sein de l'établissement.
Il est constant que, les statuts de cette organisation n'ayant été déposés que le 4 mai 2010, elle ne remplissait pas alors les conditions d'ancienneté prévues par les textes pour créer une section syndicale.
Il y a lieu en conséquence d'annuler cette création, la durée de la procédure ne pouvant avoir pour effet de valider rétroactivement une démarche dénuée de fondement juridique à l'origine.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Dit l'appel recevable et fondé ;
Infirme le jugement rendu par le tribunal de première instance de Nouméa 12 juillet 2010 ;
Annule la création par la CNTP le 20 mai 2010 d'une section syndicale au sein de la SARL Sorena ainsi que la nomination corrélative de Mme S. X... en qualité de représentante syndicale ;
Rejette les demandes présentées sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie ;
La condamne aux dépens de première instance et d'appel.

Le greffier, Le président,

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