Cour de Cassation, Chambre commerciale, du 8 juillet 1997

Cour de Cassation, Chambre commerciale, du 8 juillet 1997

96-10.189, Inédit

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par le directeur général des Impôts, domicilié ministère de l'Economie, des Finances et du Plan, ..., en cassation d'un jugement rendu le 6 janvier 1994 par le tribunal de grande instance de Dieppe, au profit de M. Pascal, Claude, Marie X..., demeurant ..., défendeur à la cassation ;

M. X..., défendeur au pourvoi principal, a formé un pourvoi incident contre le même jugement ;

Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Le demandeur au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 27 mai 1997, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Huglo, conseiller référendaire rapporteur, M. Vigneron, conseiller, M. Mourier, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Huglo, conseiller référendaire, les observations de Me Goutet, avocat du directeur général des Impôts, de la SCP Guiguet, Bachellier et de La Varde, avocat de M. X..., les conclusions de M. Mourier, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Statuant tant sur le pourvoi principal que sur le pourvoi incident ;

Sur le second moyen du pourvoi principal, pris en sa seconde branche :

Vu l'article 95 du Traité instituant la Communauté européenne, ensemble l'article 35 de la loi du 22 juin 1993 ;

Attendu, selon le jugement déféré, que M. X..., propriétaire d'un véhicule automobile d'une puissance fiscale de plus de 16 chevaux, a, après le rejet de sa réclamation présentée le 29 août 1991, assigné le directeur des Services fiscaux devant le tribunal de grande instance pour obtenir la restitution de la taxe différentielle acquittée au titre des années 1984 à 1990 ;

Attendu que, pour accueillir cette demande en restitution des taxes dues au titre des années 1989 et 1990, le Tribunal retient que l'administration fiscale ne s'explique pas sur les modalités retenues pour la détermination de la puissance fiscale du véhicule de M. X... ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que, dans son arrêt du 17 septembre 1987 (Feldain), la Cour de justice des Communautés européennes a seulement jugé incompatible avec l'article 95 du Traité la limitation du facteur K dans le mode de calcul de la puissance fiscale introduite par la circulaire du ministre de l'Equipement du 23 décembre 1977; qu'il en résulte que la taxe perçue en 1989 et 1990 sur des véhicules dont le mode de calcul de la puissance fiscale n'a pas subi cette limitation est compatible avec l'article 95 dudit Traité et qu'il appartenait dès lors à M. X... de démontrer que, malgré les dispositions des circulaires du 12 janvier 1988 et du 20 septembre 1991, la puissance fiscale de son véhicule avait été déterminée de façon incompatible avec l'article 95 du Traité, le Tribunal a violé les textes susvisés ;

Et sur le moyen unique du pourvoi incident :

Vu l'article 2 du Code civil, ensemble l'article 36 de la loi du 29 décembre 1989 ;

Attendu qu'il résulte de l'article 2 du Code civil que, lorsque la loi réduit la durée d'une prescription, la prescription réduite commence à courir, sauf disposition contraire, du jour de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle, sans que la durée totale puisse excéder le délai prévu par la loi antérieure; que l'article 36 de la loi du 29 décembre 1989, modifiant l'article L. 190 du Livre des procédures fiscales et disposant que sont instruites et jugées selon les règles du Livre des procédures fiscales toutes actions tendant à la décharge ou à la réduction d'une imposition ou à l'exercice de droit à déduction fondées sur la non-conformité de la règle de droit dont il a été fait application à une règle de droit supérieur, a eu pour effet de rendre applicable aux actions en répétition de l'indû le délai de réclamation prévu à l'article R. 196-1 de ce Livre, tandis que ces actions étaient auparavant soumises à la seule prescription trentenaire de droit commun; que ces nouvelles dispositions, qui n'ont pas pour effet de rendre excessivement difficiles les possibilités d'agir en répétition de l'indû et qui ne sont pas moins favorables que les recours similaires de droit interne, lesquels ne sont pas tous régis par la prescription trentenaire, sont applicables, aux termes de la loi, à tous les litiges engagés par des réclamations présentées après l'entrée en vigueur de la loi et qu'il en résulte que le délai institué à l'article R. 196-1 du Livre des procédures fiscales ne commence à courir qu'à compter de l'entrée en vigueur de la loi du

29 décembre 1989 ;

Attendu que, pour déclarer la réclamation de M. X... prescrite pour les années 1984 et 1985, le jugement retient que la réclamation de M. X... est tardive, le délai de l'article R. 196-1 du Livre des procédures fiscales commençant à courir à compter des arrêts Humblot et Feldain, des 9 mai 1985 et 17 septembre 1987, de la Cour de justice des Communautés européennes; qu'en statuant ainsi, le Tribunal a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi principal ;

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 6 janvier 1994, entre les parties, par le tribunal de grande instance de Dieppe; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal de grande instance de Rouen ;

Laisse à chaque partie la charge de ses dépens respectifs ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de M. X... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du huit juillet mil neuf cent quatre-vingt-dix-sept.

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