CDBF - Arrêt - 26/06/2017

CDBF - Arrêt - 26/06/2017

Ecole nationale supérieure Louis Lumière (ENSLL) - n° 214-758

LA COUR DE DISCIPLINE BUDGÉTAIRE ET FINANCIÈRE,

siégeant à la Cour des comptes, en audience publique, a rendu l’arrêt suivant :

Vu le code des juridictions financières, notamment le titre 1 er de son livre III, relatif à la Cour de discipline budgétaire et financière ;

Vu le code des marchés publics alors en vigueur ;

Vu le décret n° 91‑602 du 27 juin 1991 relatif à l’École nationale supérieure Louis Lumière ;

Vu l’arrêté du 10 avril 1995 fixant les modalités du contrôle financier de l’École nationale supérieure Louis Lumière ;

Vu la communication du 27 novembre 2014, enregistrée le même jour, par laquelle le président de la troisième chambre de la Cour des comptes a informé le procureur général près la Cour des comptes, ministère public près la Cour de discipline budgétaire et financière, de la décision, prise par ladite chambre, de déférer à la Cour de discipline budgétaire et financière des faits laissant présumer l’existence d’irrégularités susceptibles de constituer des infractions passibles des sanctions prévues aux articles L. 313-4 et L. 313-6 du code des juridictions financières, concernant la gestion de l’École nationale supérieure Louis Lumière (ENSLL), ensemble les pièces à l’appui de cette communication ;

Vu le réquisitoire du 12 février 2015 par lequel le procureur général a saisi de cette affaire le président de la Cour de discipline budgétaire et financière ;

Vu la décision du 19 février 2015, par laquelle le président de la Cour de discipline budgétaire et financière a désigné comme rapporteur M. Alain Levionnois, alors conseiller référendaire à la Cour des comptes ;

Vu la lettre du 5 octobre 2015 du procureur général, ensemble l’avis de réception de cette lettre, par laquelle, conformément aux dispositions de l’article L. 314-4 du code des juridictions financières alors en vigueur, a été mise en cause au regard des faits de l’espèce : Mme Francine X..., directrice de l’École nationale supérieure Louis Lumière depuis le 1er  mai 2007 ;

Vu la lettre du président de la Cour de discipline budgétaire et financière du 6 juillet 2016 transmettant au procureur général le dossier de l’affaire, après dépôt du rapport de M. Levionnois, en application de l’article L. 314-4 du code des juridictions financières alors en vigueur ;

Vu la lettre du procureur général du 20 octobre 2016 informant le président de la Cour de discipline budgétaire et financière, après communication du dossier de l’affaire, de sa décision de poursuivre la procédure en application de l’article L. 314-4 du code des juridictions financières alors en vigueur ;

Vu les lettres du 25 octobre 2016 par lesquelles, en application de l’article L. 314-5 du code des juridictions financières alors en vigueur, le président de la Cour de discipline budgétaire et financière a transmis pour avis le dossier de l’affaire au ministre de l’économie et des finances ainsi qu’à la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche ;

Vu la décision du procureur général du 20 janvier 2017 renvoyant Mme X... devant la Cour, en application de l’article L. 314-6 du code des juridictions financières alors en vigueur ainsi que la lettre du même jour envoyée par lui à l’intéressée pour l’informer de sa décision ;

Vu la lettre recommandée adressée le 25 janvier 2017 par la greffière de la Cour de discipline budgétaire et financière à Mme X... lui transmettant la décision de renvoi du procureur général ; l’avisant qu’elle pouvait prendre connaissance du dossier de l’affaire et produire un mémoire en défense dans les conditions prévues à l’article L. 314-8 du code des juridictions financières alors en vigueur ; et la citant à comparaître le 7 avril 2017 devant la Cour, ensemble l’avis de réception de cette lettre ;

Vu les lettres recommandées adressées le 6 mars 2017 et le 4 avril 2017 par la greffière de la Cour de discipline budgétaire et financière à Mme X..., la citant à comparaître le 28 avril 2017 puis, après rectification, le 12 mai 2017 devant la Cour, ensemble les avis de réception de ces lettres ;

Vu le mémoire en défense produit par Maîtres Latournerie et Brillat pour Mme X..., le 12 avril 2017, ensemble les pièces à l’appui ;

Vu les autres pièces du dossier, notamment le rapport d’instruction de M. Levionnois ;

Entendu le représentant du ministère public, résumant la décision de renvoi, en application de l’article L. 314-12 du code des juridictions financières ;

Entendu le procureur général en ses conclusions, en application de l’article L. 314-12 du code des juridictions financières ;

Entendu en leurs plaidoiries, Maîtres Latournerie et Brillat pour Mme X..., Mme X... ayant été invitée à présenter ses explications et observations, la défense ayant eu la parole en dernier ;

Après en avoir délibéré ;

Sur la compétence de la Cour

1.                 Considérant qu’aux termes de l’article L. 312‑1 du code des juridictions financières, sont notamment justiciables de la Cour de discipline budgétaire et financière les fonctionnaires et agents de l’État et de ses établissements publics, ainsi que tout représentant, administrateur ou agent des autres organismes qui sont soumis au contrôle de la Cour des comptes ;

2.                 Considérant que Mme X..., directrice d’un établissement public de l’État régi par les dispositions du décret n° 91‑602 du 27 juin 1991 susvisé, est justiciable de la Cour en cette qualité ;

Sur l’absence d’avis du ministre de l’économie et des finances et de la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche

3.                  Considérant que l’absence de réponse du ministre de l’économie et des finances et de la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche aux demandes d’avis formulées le 25 octobre 2016 ne fait pas obstacle à la poursuite de la procédure, en application de l’article L. 314-5 du code des juridictions financières en vigueur jusqu’au 30 avril 2017 ;

Surla prescription

4.                  Considérant qu’aux termes de l’article L. 314-2 du code des juridictions financières : «  La Courne peut être saisie après l’expiration d’un délai de cinq années révolues à compter du jour où aura été commis le fait de nature à donner lieu à l’application des sanctions prévues par le présent titre. » ;

5.                  Considérant que les faits présomptifs d’irrégularités qui sont visés par la décision de renvoi ont été portés à la connaissance du ministère public près la Cour de discipline budgétaire et financière par la communication susvisée du 27 novembre 2014 du président de la troisième chambre de la Cour des comptes ; qu’il en résulte que les faits postérieurs au 27 novembre 2009 ne sont pas couverts par la prescription de cinq ans ;

I.                  Sur le respect des règles relatives au contrôle financier de l’École nationale supérieure Louis Lumière

Sur les faits

6.                  Considérant qu’aux termes de l’article 6 de l’arrêté interministériel du 10 avril 1995 fixant les modalités du contrôle financier de l’École nationale supérieure Louis Lumière, en vigueur au moment des faits, devaient être soumis au visa préalable du contrôleur financier les marchés, conventions, contrats, commandes, baux, dont le montant dépassait la moitié du seuil fixé à l’article 123 du code des marchés publics, soit, dans la rédaction de ce code en vigueur au moment de la publication de cet arrêté, 150 000 francs (22 868 € TTC ; 19 120 € HT) ;

7.                  Considérant que la directrice de l’ENSLL a engagé au cours des années 2010 à 2012, sans visa du contrôleur financier de cet établissement public, les dépenses suivantes :

-          l’achat en juillet 2010, pour un montant de 20 800 € HT, de prestations d’acousticien conseil en vue de la définition d’un cahier des charges acoustique des locaux de l’ENSLL, alors en construction ;

-          la commande, le 20 juillet 2010, à un groupement de trois entreprises, de prestations de maîtrise d’œuvre des travaux d’aménagement de la partie, dite de la « zone son » des locaux de l’ENSLL, pour un montant de 36 825 € HT ;

-          la commande, par un ordre de service daté du 18 juillet 2011, de travaux d’aménagement de la « zone son » des locaux de l’ENSLL, pour un coût total de 690 242,12 € HT, à trois sociétés ;

-          la fourniture et l’installation d’équipements audiovisuels et mobiliers spécifiques, par un marché alloti, notifié en janvier 2012, pour un montant total de 1 383 102 € HT ;

-          la fourniture et l’installation d’équipements audiovisuels et mobiliers spécifiques, commandés en mai 2012 aux sociétés Marechal Electric , pour 70 348 € HT, et E.E.S ., pour 66 675,04 € HT, et en juillet 2012 à la société FL Décors , pour 41 256 € HT ;

-          l’acquisition d’équipements et de fournitures informatiques présentant un caractère homogène : entre le 10 mai et le 14 décembre 2011 à la société Apple Sales International , pour 23 023 € HT, entre le 10 mai et le 12 juillet 2012 à la société Dell SA , pour 57 403 € HT, et entre le 5 juin et le 22 octobre 2012 à la société France Systèmes , pour 12 608,35 € HT ;

-          l’achat le 31 janvier 2012 à la société ARRI d’une caméra numérique et ses accessoires, pour un montant de 68 265,50 € HT ;

Sur la qualification juridique des faits et l’imputation des responsabilités

8.                  Considérant que Mme X... a signé les conventions et les accords par lesquels l’ENSLL s’engageait vis-à-vis de fournisseurs, qu’elle en a visé les factures, sans que ces engagements de dépenses aient été soumis au visa préalable du contrôleur financier de l’ENSLL ; qu’elle porte ainsi la responsabilité directe des engagements de dépenses relatifs à ces opérations ;

9.                  Considérant qu’en procédant à l’engagement de dépenses, sans avoir préalablement obtenu le visa du contrôleur financier, pour des achats dont le montant excédait le seuil prévu par l’arrêté interministériel du 10 avril 1995 précité, Mme X... a commis une infraction aux règles mentionnées à l’article L. 313-1 du code des juridictions financières et engagé sa responsabilité sur ce fondement ;

II.               Sur le respect des règles relatives à la commande publique

10.              Considérant que l’École nationale supérieure Louis Lumière est un établissement public de l’État, à ce titre soumis à la règlementation des marchés publics, tel qu’elle résultait au moment des faits déférés à la Cour, du décret n° 2006-975 du 1 er  août 2006 ;

11.              Considérant qu’une note interne, établie par la directrice de l’École le 11 septembre 2007, a défini les modalités de la consultation des entreprises en matière de procédures adaptées, en imposant, pour les achats unitaires compris entre l’ancien seuil des marchés passés sous forme écrite, soit 4 000 €, et 30 000 € HT, la production de trois devis, et à défaut, en cas de production de deux devis seulement, de faire certifier la procédure par l’ordonnateur de l’établissement public ; que cette instruction envisageait l’hypothèse d’une absence de mise en concurrence, qui devait alors faire l’objet d’une justification explicite ; qu’au-delà de 30 000 € et jusqu’à 67 500 € HT, l’instruction du 11 septembre 2007 exigeait une publicité sur le portail Internet de l’École, ainsi qu’une publication au bulletin officiel des marchés publics ou dans un journal d’annonces légales ;

Sur les faits, leur qualification juridique et l’imputation des responsabilités

II-1. Sur les prestations de maîtrise d’œuvre et les travaux d’aménagement de la « zone son »

12.              Considérant que l’ENSLL a conclu, le 20 juillet 2010, une convention de maîtrise d’œuvre avec un groupement de trois entreprises pour la réalisation de prestations de maîtrise d’œuvre des travaux d’aménagement de la « zone son » des locaux de l’ENSLL au sein de la Cité du cinéma ; que le montant des prestations commandées par ce contrat était de 36 825 € HT, dont 28 825 € au titre de la tranche ferme et 8 000 € pour une tranche conditionnelle ;

13.              Considérant que cette commande, qui a bien revêtu une forme écrite, pouvait faire l’objet d’un marché passé selon une procédure adaptée (MAPA), au sens de l’article 28 du code des marchés publics dans sa rédaction alors applicable, sous condition de faire l’objet d’une publicité appropriée ;

14.              Considérant qu’en exécution de la convention de maîtrise d’œuvre, Mme X... a émis sept mandats de paiement au profit du groupement pour un montant total de 34 974,81 € TTC, soit 29 243,15 € HT, au titre de la tranche ferme, y compris les révisions de prix contractuelles ; que la tranche conditionnelle n’a pas été affermie ;

15.              Considérant que l’ENSLL a confié les travaux d’aménagement de la « zone son » au maître d’ouvrage de la construction de la Cité du cinéma, la société EuropaCorp Studios , pour un coût de 690 242,12 € HT ; que cette décision a fait l’objet d’un ordre de service en date du 18 juillet 2011, signé par la société EuropaCorp Studios , « maître d’ouvrage », la société Vinci Immobilier , « promoteur », la société La   Nef Lumière , « acquéreur bailleur » et l’ENSLL, « preneur/locataire », représentée par sa directrice, Mme  X... ;

16.              Considérant que cet ordre de service se présentait comme un acte d’exécution du contrat de promotion immobilière conclu le 28 mai 2009 entre les sociétés EuropaCorp Studios et Vinci Immobilier pour la construction alors en cours de la Cité du cinéma ; qu’il avait pour objet de confier au promoteur immobilier choisi par la société EuropaCorp Studios la réalisation de travaux supplémentaires, nécessaires à l’installation de l’ENSLL dans les locaux et mis à la charge de celle-ci ;

17.              Considérant que Mme X... a émis, entre décembre 2011 et avril 2013, cinq mandats de paiement au profit de la société EuropaCorp Studios , pour un montant total de 825 529,57 € TTC, soit 690 242,12 € HT, pour le paiement de ces travaux ;

18.              Considérant que l’article 40 du code des marchés publics imposait notamment au pouvoir adjudicateur de publier un avis d’appel public à la concurrence dans le bulletin officiel des annonces des marchés publics ou au moins dans un journal habilité à recevoir des annonces légales ; que, tant pour l’achat des prestations de maîtrise d’œuvre que pour la réalisation des travaux d’aménagement de la « zone son », aucune mesure de publicité ou de mise en concurrence n’a été réalisée ; que, toutefois, en application du 8° du II de l’article 35 du code des marchés publics applicable au moment des faits, les pouvoirs adjudicateurs pouvaient conclure sans publicité ni mise en concurrence des marchés négociés ne pouvant être confiés qu’à un opérateur économique déterminé notamment pour des raisons techniques ;

19.              Considérant que, pour des raisons tenant tant à la nature des travaux à réaliser qu’à la circonstance que ces travaux devaient être effectués sur un bâtiment en cours de construction sous la maîtrise d’ouvrage de la société EuropaCorp Studios , les prestations en cause ne pouvaient être confiées qu’au maître d’œuvre choisi par cette société et aux entreprises retenues par elle pour la construction de ce bâtiment ;

20.              Considérant, par suite, que, dans les circonstances de l’espèce, aucun manquement aux règles mentionnées à l’article L. 313-4 ne peut être reproché à Mme X... et qu’il n’y a donc pas lieu d’engager sa responsabilité sur ce fondement ;

II-2. Sur les autres marchés

Sur le marché de fournitures et d’installation d’équipements audiovisuels et mobiliers spécifiques (dialogue compétitif)

21.              Considérant que l’ENSLL a choisi, pour la passation d’un marché alloti de fournitures et d’installation d’équipements audiovisuels et de mobiliers spécifiques, de recourir à la procédure de dialogue compétitif, régie par les articles 36 et 67 du code des marchés publics alors applicable ;

22.              Considérant que l’avis d’appel à la concurrence n’a fait l’objet d’une publication qu’au bulletin officiel des marchés publics (BOAMP), à l’exclusion du Journal officiel de l’Union européenne (JOUE), alors que l’avis de marché envoyé en publication le 20 juillet 2011 faisait mention d’une estimation de la valeur de 2 347 000 € HT et que les trois lots notifiés en janvier 2012 représentaient en prix de base un engagement total de 1 383 102 € HT, supérieur au seuil des marchés européens, soit 130 000 € HT au 1 er  janvier 2012 s’agissant des marchés de fournitures ;

23.              Considérant que le nombre minimum de candidatures admis à la procédure de dialogue était fixé à deux et le nombre maximal à trois par le règlement de consultation, ce qui n’était pas conforme aux dispositions de l’article 67 du code des marchés publics dans sa rédaction issue du décret n° 2010-1177 du 5 octobre 2010, selon lequel : « […] Le pouvoir adjudicateur peut décider de limiter le nombre de candidats qui seront admis à participer au dialogue. Il mentionne cette décision dans l’avis d’appel public à la concurrence. Il fixe dans cet avis un nombre minimum de candidats admis à présenter une offre et peut également fixer un nombre maximum. Ce nombre minimum ne peut être inférieur à trois. […] Lorsque le nombre de candidats satisfaisant aux critères de sélection des candidatures est inférieur au nombre minimum, le pouvoir adjudicateur peut continuer la procédure avec les seuls candidats sélectionnés […] » ; que le rapport d’analyse des offres daté de janvier 2012 confirme que seulement deux candidatures ont été admises à la phase de dialogue ;

24.              Considérant que le même rapport d’analyse des offres fait ressortir que la phase de dialogue et celle de l’analyse des offres ont été conduites sans tenir compte de l’allotissement initialement prévu, les deux candidats ayant concouru simultanément pour les trois lots considérés comme de simples divisions de leur offre globale ; que la phase du dialogue n’a pas fait l’objet de procès-verbaux, ce qui constitue un manquement à l’obligation de transparence de la procédure ; qu’il n’a de surcroît été établi aucun rapport de présentation de la procédure de dialogue compétitif ni apporté de justification sur le choix du recours à cette procédure ;

25.              Considérant qu’il n’a pas été établi de cahier des clauses administratives particulières, en méconnaissance des dispositions de l’article 11 du code des marchés publics alors applicable, précisant notamment les modalités de révision des prix annoncées dans le règlement de la consultation ;

26.              Considérant qu’il résulte de ce qui précède que ce marché a été passé selon une procédure de publicité et de mise en concurrence qui n’était pas conforme aux dispositions du code des marchés publics applicable en juillet 2011 ;

Sur les marchés de fourniture et d’installation d’équipements audiovisuels et mobiliers spécifiques (procédure adaptée)

27.              Considérant que, pour pallier l’impossibilité d’allouer l’un des lots du marché passé après dialogue compétitif notifié en janvier 2012, l’ENSLL a passé trois autres marchés en procédure adaptée concernant respectivement :

-         la fourniture de lignes et de boîtes de branchements électriques pour les éclairages audiovisuels, marché notifié le 4 mai 2012, pour un montant de 70 348 € HT ;

-         la fourniture et l’installation de deux ensembles de supports de projecteurs suspendus, marché notifié le 9 mai 2012, pour un montant de 66 675,04 € HT ;

-         la fourniture et l’installation de rideaux-cyclos pour quatre studios de prise de vue, marché notifié le 3 juillet 2012, pour un montant de 41 256 € HT ;

28.              Considérant que la publicité et la mise en concurrence préalable concernant ces trois marchés s’est limitée à une publication de l’avis d’appel à la concurrence sur le site Internet de l’École, alors que, pour les montants en cause, l’instruction interne du 11 septembre 2007 sur les procédures d’achat en deçà des seuils des marchés formalisés prévoyait également une publication au BOAMP ou dans un journal d’annonces légales, ainsi que l’établissement d’un dossier de consultation des entreprises ;

29.              Considérant que le délai qui a séparé la publication de l’avis d’appel à la concurrence et la date limite de remise des offres a été limité à deux semaines pour le marché attribué à la société Marechal Electric et pour celui attribué à la société E.E.S. et à 20 jours, mais entrecoupés de deux « ponts », pour le marché conclu avec la société FL Décors  ; que pour chacun des trois marchés, l’École n’a reçu qu’une seule offre ;

30.              Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la procédure de publicité et de mise en concurrence mise en œuvre pour ces trois marchés n’a pas été conforme à la règlementation applicable à l’ENSLL et n’a pas satisfait aux obligations de transparence et d’égalité d’accès à la commande publique ;

31.              Considérant, en outre, que le total des trois mandatements émis au profit de la société  E.E.S ., à concurrence de 87 252,04 € HT, excédait son offre retenue limitée à 66 675,04 € HT et que le total des huit mandatements émis au profit de la société FL Décors , à concurrence de 62 802 € HT excédait également l’offre de cette entreprise qui était de 41 256 € HT ; qu’en conséquence, une partie des règlements, ordonnancés au bénéfice de ces deux fournisseurs, est intervenue en dépassement des montants des marchés qui avaient été acceptés ;

Sur les marchés d’équipement et de fournitures informatiques

32.              Considérant que la directrice de l’ENSLL a émis, entre le 10 mai 2011 et le 12 juillet 2012, 13 mandats de paiement, pour un montant total de 57 403 € HT, au bénéfice de la société Dell SA pour l’acquisition d’ordinateurs portables ou fixes ; entre le 10 mai 2011 et le 14 décembre 2011, sept mandats de paiement, pour un montant total de 23 022,95 € HT, au bénéfice de la société Apple Sales International pour l’acquisition d’ordinateurs de cette société ; entre le 5 juin et le 22 octobre 2012, trois mandats, pour un montant total de 12 608,35 € HT, au bénéfice de la société France Systèmes , pour l’acquisition de serveurs ; le 31 janvier 2012, deux mandats, d’un montant global de 68 265,50 € HT, au bénéfice de la société ARRI , pour l’acquisition d’une caméra numérique et ses accessoires ;

33.              Considérant que l’acquisition de ces matériels et équipements informatiques et électroniques auprès de ces quatre sociétés est intervenue en dehors de tout contrat écrit et de toute mise en concurrence ;

34.              Considérant, au surplus, que dans ces différents achats le choix des entreprises attributaires a été effectué en fonction des marques des produits qu’elles commercialisaient, en contradiction avec les dispositions du IV de l’article 6 du code des marchés publics, aux termes duquel : «  Les spécifications techniques ne peuvent pas faire mention d’un mode ou procédé de fabrication particulier ou d’une provenance ou origine déterminée, ni faire référence à une marque, à un brevet ou à un type, dès lors qu’une telle mention ou référence aurait pour effet de favoriser ou d’éliminer certains opérateurs économiques ou certains produits […]», sauf « […] si elle est justifiée par l’objet du marché ou, à titre exceptionnel, dans le cas où une description suffisamment précise et intelligible de l’objet du marché n’est pas possible sans elle et à la condition qu’elle soit accompagnée des termes : " ou équivalent " » ;

35.              Considérant que pour l’ensemble de ces opérations, Mme X..., directrice de l’ENSLL, a procédé à des commandes de travaux, de prestations ou de fournitures, au profit de l’ENSLL, dans des conditions irrégulières au regard des dispositions du code des marchés publics ou des dispositions internes applicables dans l’établissement public en matière de procédures d’achat ; que Mme X... a commis une infraction aux règles mentionnées à l’article L. 313‑4 du code des juridictions financières et a engagé sa responsabilité sur ce fondement ;

III.           Sur les circonstances

36.             Considérant que Mme X... a eu à gérer le transfert dans des nouveaux locaux de l’École qu’elle dirigeait dans des conditions difficiles ; que l’équipe administrative et technique qui l’assistait était très restreinte ; qu’elle a demandé l’appui de l’autorité de tutelle pour disposer d’un soutien logistique et financier, lequel ne lui a pas été accordé ; que ces faits sont susceptibles de constituer des circonstances atténuantes de la responsabilité de Mme X... ;

IV.            Sur l’amende

37.              Considérant qu’une juste appréciation des irrégularités commises et des circonstances de l’espèce conduit à infliger à Mme X... une amende 400 euros ;

V.               Sur la publication de l’arrêt

38.              Considérant qu’il n’y a pas lieu, en application de l’article L. 313-15 du code des juridictions financières et dans les circonstances de l’espèce, de publier le présent arrêt ;

ARRÊTE :

Article 1 er: Mme Francine X... est condamnée à une amende de quatre cents euros (400 €) ;

Article 2  : Le présent arrêt ne sera pas publié.

Délibéré par la Cour de discipline budgétaire et financière, formation plénière, le 12 mai deux mille dix-sept, par M. Larzul, conseiller d’État, président ; MM. Guyomar, Boulouis, Derepas et Dacosta, conseillers d’État ; MM. Maistre, Bertucci, Mme Coudurier, conseillers maîtres à la Cour des comptes.

Notifié le 26 juin deux mille dix-sept.

En conséquence, la République mande et ordonne à tous huissiers de justice sur ce requis de mettre ledit arrêt à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous les commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.

En foi de quoi, le présent arrêt a été signé par le président de la Cour et la greffière.

Le président,

La greffière,

Tanneguy Larzul

Isabelle REYT

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