CRTC. CRC Alsace. Jugement. 16/01/2014
CRTC. CRC Alsace. Jugement. 16/01/2014
Etablissement public local d'enseignement - collège de Bourtzwiller - Bourtzwiller (Haut-Rhin). n° 2013-016
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA CHAMBRE REGIONALE DES COMPTES
siégeant en audience publique
VU le réquisitoire en date du 3 juillet 2013, notifié le 9 septembre 2013 à Mme X., comptable, et le 12 juillet 2013 à M. le principal du collège de Bourtzwiller, ordonnateur, par lequel le procureur financier près la chambre régionale des comptes d’Alsace a saisi la juridiction d’opérations effectuées par le comptable dans le cadre de la gestion du collège de Bourtzwiller au cours de l’exercice 2010, aux fins de statuer sur sa responsabilité personnelle et pécuniaire ;
VU les comptes rendus en qualité de comptable du collège de Bourtzwiller pour les années 2007 à 2011, au 29 août, par Mme X. ;
VU le code des juridictions financières ;
VU l’article 60 de la loi de finances pour 1963 n° 63-156 du 23 février 1963 dans sa rédaction issue de l’article 90 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificatives pour 2011 ;
VU le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 modifié portant règlement général sur la comptabilité publique, alors applicable ;
VU le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du 2e alinéa du VI de l’article 60 de la loi de finances pour 1963 susvisée ;
VU les lois et règlements relatifs à la comptabilité des établissements publics locaux d’enseignement ;
VU les courriers du rapporteur chargé de l’instruction en date des 17 et 19 juillet 2013 invitant Mme X. à présenter ses observations en réponse au réquisitoire du procureur financier ;
VU les observations en date du 11 septembre 2013 enregistrées au greffe de la chambre le 17 septembre 2013 sous le numéro 993, présentées par Mme X., comptable mis en cause ;
VU le rapport d’instruction ;
VU les conclusions du procureur financier ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;
Après avoir entendu, en audience publique du 5 décembre 2013,M. Marcel-Gérard Hauswirth, premier conseiller, en son rapport, et M. Frédéric Guthmann, procureur financier, en ses conclusions ;
Les parties n’étant ni présentes ni représentées ;
Après avoir délibéré conformément à la loi, M. Marc Noël, président de section, président, Mmes Axelle Toupet et Florence Gaubout-Deschamps, premières conseillères ;
STATUANT EN FORMATION SECTION
1. En ce qui concerne le non recouvrement de créances apparaissant fin 2010 au débit du compte 4631 « ordres de recettes à recouvrer sur exercices antérieurs »
Considérant que, par le réquisitoire susvisé du 3 juillet 2013, le procureur financier a saisi la chambre en vue de statuer sur la responsabilité personnelle et pécuniaire de Mme X. pour non recouvrement de créances d’un montant total de 31 235 € figurant au débit du compte 4631 « ordres de recettes à recouvrer sur exercices antérieurs» au 31 décembre 2010 et admises en non valeur par délibération du 12 avril 2012 du conseil d’administration du collège de Bourtzwiller avec comme motif « aucun travail de gestion ou de comptabilité depuis l’origine et aucune PJ » ;
Considérant que dans sa réponse susvisée du 11 septembre 2013, Mme X. indique qu’à la suite de son départ de l’agence comptable du Lycée Lavoisier de Mulhouse, elle n’avait jamais eu connaissance de réserves comptables émises par son successeur ; qu’elle met en avant le fait, qu’après avoir quitté ses fonctions depuis plus de deux ans, elle n’a plus en mémoire de manière précise les opérations comptables en cause, ce qui est aggravé par le déplacement de l’agence comptable postérieurement à son départ du poste ;
Considérant par ailleurs que la comptable s’étonne du « débit de 31 235 € de 1999 » puisqu’aucune somme d’un tel montant (converti en francs) ne figurait alors au compte 4631 comme l’atteste, selon elle, les réserves qu’elle avait émise le 16 février 2001 ; elle indique qu’en tout état de cause, une somme de ce montant, depuis 1999, n’aurait pu être admise en non valeur faute de réserves suffisantes à la disposition de l’établissement et d’accord de la tutelle (département de Haut-Rhin) ;
Considérant que l’ordonnateur n’a pas produit de mémoire dans le cadre de l’instance ;
Considérant que les explications de la comptable ne répondent pas à la question soulevée portant sur les justifications détaillées du solde débiteur de 31 235 € figurant au compte 4631 arrêté au 31 décembre 2010, et non pas fin 1999 comme mentionné dans ses observations, cumulant des prises en charge il est vrai de créances remontant à 1999, et ayant fait l’objet d’une admission en non valeur au cours de l’exercice 2012 ;
Considérant qu’en application des dispositions combinées du I de l’article 60 de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 modifiée et de l’article 11 du décret du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique susvisés, les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables, notamment, du recouvrement des recettes, de la conservation des pièces justificatives des opérations et documents de comptabilité ainsi que, à titre général, de la tenue de la comptabilité du poste comptable qu'ils dirigent ; que leur responsabilité personnelle et pécuniaire se trouve engagée dès lors, en particulier, qu'un déficit ou un manquant en monnaie ou en valeurs a été constaté ou qu'une recette n'a pas été recouvrée ;
Considérant que les comptes des exercices 2006 et antérieurs sont désormais atteints par la prescription extinctive quinquennale visée par l’article 60 IV de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 modifiée ;
Considérant que, eu égard à la prescription quadriennale de l’action en recouvrement des comptables publics prévue par l’article L. 1617-5 3e du code général des collectivités territoriales, le montant total de 31 235 € cité par le procureur financier doit être diminué de deux créances dont la prise en charge est datée du 31 décembre 1999, pour des montants respectifs de 73,63 € et 126,86 €, et d’une autre datée du 31 décembre 2001, pour 59,09 €, les délais de l’action en recouvrement du comptable, pour chacune de ces créances, étant arrivés à leur terme au cours d’exercices désormais atteints par la prescription extinctive précitée ; qu’ainsi, la somme pouvant être retenue à la charge du comptable se limite à 30 975,42 € ;
Considérant que Mme X. n’a pas été à même de justifier le détail des créances pour le montant total de 30 975,42 € admis en non-valeur et encore moins de la mise en œuvre de diligences rapides, adéquates et complètes en vue de leur recouvrement ;
Considérant que les explications de la comptable relatives notamment à son éloignement géographique et temporel de poste qu’elle occupait au moment des faits ou encore aux difficultés à obtenir plus tôt une admission en non valeur ne sauraient constituer des circonstances relevant de la force majeure, de nature à l’exonérer de sa responsabilité ;
Considérant qu’il y a lieu de constater une perte de recettes pour l’établissement constitutive du préjudice financier prévu parl’article 60 de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 modifiée ; qu’en présence d’un préjudice financier, les éventuelles circonstances atténuantes avancées par le comptable sont inopérantes et qu’il y a donc lieu de mettre en jeu la responsabilité personnelle et pécuniaire de Mme X. à hauteur du total de la somme de 30 975,42 € non recouvrée ;
2. En ce qui concerne l’absence de régularisation de sommes apparaissant au débit du compte 47211 « dépenses payées avant ordonnancement »
Considérant que, par le réquisitoire susvisé du 3 juillet 2013, le procureur financier a saisi la chambre en vue de statuer sur la responsabilité personnelle et pécuniaire de Mme X. pour non régularisation de deux dépenses payées avant ordonnancement, apparaissant au débit du compte 47211, pour des montants de 2 318,23 € et 314,40 €, soit un total de 2 632,63 €, au 31 décembre 2010 et admises en non valeur par délibération du 12 avril 2012 du conseil d’administration du collège de Bourtzwiller avec comme motif « aucun travail de gestion ou de comptabilité depuis l’origine et aucune PJ » ;
Considérant que la somme de 2 318,23 € a été prélevée en décembre 2006 pour des contrats aidés CAE (contrat d’accompagnement dans l’emploi) et CAV (contrat d’avenir) tandis que la somme de 314,40 € est identifiée comme concernant le règlement d’une facture de la SNCF dont l’opération est restée en suspens au compte transitoire du fait que le gestionnaire du collège n’a pas procédé à l’établissement du mandat correspondant pour régularisation ;
Considérant que la comptable, outre les considérations générales sur son éloignement géographique du poste qu’elle occupait au moment des faits et la question des réserves de son successeur, comme repris plus haut, confirme, dans sa réponse au réquisitoire que, s’agissant de la somme de 2 318,23 € afférente aux contrats aidés, l’opération remonte à l’exercice 2006 ; qu’elle fait état d’un travail de pointage qui avait débouché sur la reconnaissance d’erreur ayant conduit l’agence de service et de paiement (ASP successeur du CNASEA) à verser des sommes complémentaires « et qu’un travail a été mené pour aboutir à une situation comptable claire » ; qu’à son départ, elle n’avait pas considéré qu’une admission en non valeur se justifiait ; qu’elle ne dispose par ailleurs d’aucun élément s’agissant du chèque à l’ordre de la SNCF ;
Considérant que Mme X. explique plus particulièrement l’absence de régularisation des deux opérations en cause par le fait que ses relations avec le gestionnaire en place « n’ont jamais été simples, se réduisant à des notes écrites directement à l’ordonnateur » en précisant que « les archives de l’agence comptable peuvent en attester » ;
Considérant que l’ordonnateur n’a pas produit de mémoire dans le cadre de l’instance ;
Considérant qu’en application des dispositions combinées du I de l’article 60 de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 et de l’article 11 du décret du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique susvisés, les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables du recouvrement des recettes, du paiement des dépenses, de la garde et de la conservation des fonds et valeurs, du maniement des fonds et des mouvements de comptes de disponibilités, de la conservation des pièces justificatives des opérations et documents de comptabilité ainsi que, plus généralement, de la tenue de la comptabilité du poste comptable qu'ils dirigent ;
Considérant que la comptable n’a pas été à même de justifier de diligences expresses qui auraient été mises en œuvre en vue d’obtenir auprès de l’ordonnateur la régularisation comptable des opérations en cause par l’imputation des charges correspondantes, faute de l’émission des mandats afférents ; que ce manquement altérant la bonne tenue du compte, tant en termes comptable que budgétaire, est de nature à engager la responsabilité personnelle et pécuniaire de Mme X. ;
Considérant qu’il n’y a pas lieu de relever de circonstances constitutives de la force majeure, lesquelles auraient supposé l’existence d’un évènement imprévisible, extérieur et irrésistible, non avérées en l’espèce ni même alléguées par la comptable ;
Considérantque les opérations précitées de 2 318,23 € et de 314,40 € ont été payées avant mandatement par le débit du compte 47211 « dépenses payées avant ordonnancement » et par le crédit du compte de trésorerie ; que ces deux opérations ont été payées et inscrites à ce compte de tiers 47211 par manque d’informations quant à une imputation définitive ;
Considérant que la décision d’admission en non-valeur de ces deux opérations ne crée pas une dépense supplémentaire réelle pour le collège mais permet de régulariser les écritures demeurant dans la comptabilité générale, par une opération d’ordre budgétaire consistant à débiter le compte 671 « charges exceptionnelles sur opérations de gestion » et créditer du même montant le compte 47211, tendant ainsi à son apurement ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que l’absence de régularisation des deux opérations considérées n’a pas causé de préjudice financier à l’établissement ;
Considérant qu’en application du VI, alinéa 2, de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée : « lorsque le manquement du comptable […] n’a pas causé de préjudice financier […] », le juge des comptes « peut obliger le comptable à s’acquitter d’une somme arrêtée, pour chaque exercice, en tenant compte des circonstances de l’espèce » ; que le montant maximal de cette somme est fixé, par le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 susvisé, à un millième et demi du montant du cautionnement prévu pour le poste comptable, soit 235,50 € au cas particulier ;
Considérant que le comptable en poste, successeur de Mme X., M. Y., a confirmé au cours de l’instruction, par un courrier en date du 2 juillet 2013, que l’absence de mandatement du prélèvement CAE-CAV de 2 318,23 € ainsi que celui de la facture SNCF de 314,40 € au cours de la gestion de Mme X. avait pour origine une carence du gestionnaire et que lui-même s’était « heurté à son incompétence » ; que c’est cette situation qui avait en définitive débouché sur la demande d’admission en non valeur présentée par le chef d’établissement ;
Considérant que dans ce contexte, il sera fait une juste appréciation des circonstances de l’espèce en fixant à 50 € la somme mise à la charge de Mme X. ;
Sur la situation de la comptable
Considérant que les charges prononcées à l’encontre de Mme X. portent sur l’exercice 2010 et qu’il y a en conséquence lieu de surseoir à la décharger de sa gestion au cours de l’année 2010 ;
Par ces motifs
ordonne
Article 1 : Mme X. est constituée débitrice du collège de Bourtzwiller pour la somme totale de 30 975,42 € (trente mille neuf cent soixante quinze euros et quarante deux centimes) au titre de sa gestion au cours de l’année 2010, augmentée des intérêts de droit à compter du 9 septembre 2013, date de réception du réquisitoire.
Article 2: Une somme de 50 € (cinquante euros) est mise à la charge de Mme X. au titre de sa gestion au cours de l’année 2010.
Article 3 : Il est en conséquence sursis à la décharge de Mme X. pour sa gestion au cours de l’année 2010.
Article 4 : Le présent jugement sera notifié à Mme X., comptable, au Principal du collège de Bourtzwiller, ainsi qu’au Ministère public.
Fait et jugé à la chambre régionale des comptes d’Alsace le cinq décembre deux mille treize.
La greffière,
Le président de section,
signé : Marie-Hélène Richert
signé : Marc Noël
En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit jugement à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d'y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu'ils en seront légalement requis.
Collationné, certifié conforme
à la minute étant au greffe,
de la chambre régionale des comptes d'Alsace
et délivré par moi, Secrétaire générale,
A Strasbourg, le 16 janvier 2014
Bénédicte Mutschélé
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