CAA de MARSEILLE, 02/08/2019
CAA de MARSEILLE, 02/08/2019
19MA03551 Ordonnance de référé, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D... A... et les sociétés à responsabilité limitée (SARL) Caves du Languedoc Roussillon et Nicolas Chebille ont demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 29 janvier 2019 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé à Mme A... la délivrance d'un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement.
Par un jugement n° 1901076 du 24 mai 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 30 juillet 2019, les SARL Caves du Languedoc Roussillon et Nicolas Chebille et Mme A..., représentés par Me C..., demandent à la Cour :
1°) d'ordonner, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de l'arrêté du 29 janvier 2019 ;
2°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de délivrer à Mme A... un titre de séjour portant la mention " salariée " ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent que :
- la condition d'urgence posée par l'article L. 521-1 du code de justice administrative est satisfaite tant pour Mme A... que pour son employeur la SARL Caves du Languedoc Roussillon ;
- la condition tenant à l'existence d'un doute sérieux sur la légalité de l'arrêté contesté est également remplie ;
- en effet, l'arrêté en litige en tant qu'il emporte refus de séjour est entaché d'un défaut de motivation ;
- il est entaché d'une " erreur manifeste d'appréciation " en tant qu'il refuse à Mme A... un titre de séjour portant la mention " salariée " ;
- l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'illégalité du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour.
Vu :
- la copie de la requête à fin d'annulation, enregistrée le 23 juillet 2019, sous le n° 19MA03430 ;
- la décision du 1er septembre 2018 de la présidente de la cour administrative d'appel de Marseille désignant Mme B..., présidente de la 9ème chambre, pour juger les référés ;
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision (...) ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut rejeter une requête par une ordonnance motivée, sans instruction contradictoire ni audience publique, lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.
2. Mme A..., de nationalité chinoise née le 29 mai 1991, entrée sur le territoire national le 11 mars 2011 munie d'un passeport revêtu d'un visa " D ", long séjour, mention " étudiant ", valable du 2 mars 2011 au 2 mars 2012, et dont le titre de séjour portant la mention " étudiant " a été renouvelé jusqu'au 31 octobre 2018, a sollicité, le 2 octobre 2018, un changement de statut " étudiant " à " salarié ". Par un arrêté du 29 janvier 2019, le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement. Par un jugement du 24 mai 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de Mme A... et des SARL Caves du Languedoc Roussillon et Nicolas Chebille tendant à l'annulation de cet arrêté. La SARL Caves du Languedoc Roussillon et autres, qui ont fait appel de ce jugement, demandent au juge des référés de la Cour la suspension de l'exécution de l'arrêté du 29 janvier 2019 du préfet de l'Hérault.
Sur les conclusions à fin de suspension de l'arrêté préfectoral du 29 janvier 2019 en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français :
3. Par les dispositions des I et II de l'article L. 511-1 et de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de la procédure contentieuse régissant la contestation de la légalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français. Cette procédure se caractérise en particulier par le fait que la mesure d'éloignement ne peut pas être exécutée d'office pendant le délai de départ volontaire accordé, qu'elle doit être contestée dans le délai de trente jours en cas d'octroi d'un délai de départ volontaire ou dans le délai de quarante-huit heures, en cas de refus d'un tel délai, par le caractère suspensif du recours exercé devant le tribunal administratif à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français et par le délai de trois mois accordé au tribunal administratif à compter de sa saisine pour statuer, délai réduit à soixante-douze heures en cas d'assignation à résidence ou de rétention administrative de l'intéressé. L'appel est lui-même enfermé dans un délai spécifique réduit à un mois par l'article R. 776-9 du code de justice administrative. Eu égard aux caractéristiques particulières de la procédure ainsi définie, l'étranger qui fait appel du jugement rejetant sa demande en annulation de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français n'est, en principe, pas recevable à demander au juge des référés de la Cour, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de cette décision. Une obligation de quitter le territoire français n'est justiciable d'une procédure de référé-suspension que dans le cas où les mesures par lesquelles il est procédé à l'exécution d'une telle décision comportent des effets qui, en raison de changements dans les circonstances de droit ou de fait depuis l'intervention de cet arrêté, excèdent le cadre qu'implique normalement sa mise à exécution. Mme A... et les sociétés requérantes n'invoquent aucun changement dans les circonstances de droit ou de fait survenu postérieurement à l'intervention de l'arrêté portant obligation de quitter le territoire français et qui serait susceptible de faire obstacle à son exécution normale. Il s'ensuit que Mme A... et les sociétés requérantes ne sont pas recevables à demander au juge des référés de la Cour, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de l'arrêté du 29 janvier 2019 en tant que par cette décision, le préfet de l'Hérault a fait obligation à Mme A... de quitter le territoire français.
Sur les conclusions à fin de suspension de l'arrêté préfectoral du 29 janvier 2019 en tant qu'il porte refus de séjour :
4. L'urgence justifie que soit prononcée la suspension d'un acte administratif lorsque l'exécution de celui-ci porte atteinte de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. Il appartient au juge des référés, saisi d'une demande de suspension d'une décision refusant la délivrance d'un titre de séjour, d'apprécier et de motiver l'urgence compte tenu de l'incidence immédiate du refus de titre de séjour sur la situation concrète de l'intéressé. Cette situation d'urgence sera, en principe, constatée dans le cas d'un refus de renouvellement du titre de séjour comme dans le cas du retrait de celui-ci. Dans les autres cas, il appartient au requérant de justifier de circonstances particulières caractérisant la nécessité pour lui de bénéficier, à très bref délai, d'une mesure provisoire dans l'attente d'une décision juridictionnelle statuant sur la légalité de la décision litigieuse.
5. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté en litige a pour objet d'opposer un refus à une demande d'admission au séjour et ne rejette pas une demande de renouvellement de titre de séjour. Par suite, le présent litige n'entre pas dans les cas d'un refus de renouvellement ou d'un retrait d'un titre de séjour pour lesquels l'urgence est présumée.
6. Pour établir que la condition d'urgence posée par l'article L. 521-1 du code de justice administrative serait satisfaite, les requérantes font état, d'une part, de la présence en France de Mme A... d'une durée de six ans, du parcours universitaire brillant de l'intéressée et de la circonstance qu'elle détient un diplôme particulièrement recherché en oenologie et de sa volonté de s'insérer professionnellement et personnellement dans la société française. Toutefois, et nonobstant le sérieux des études poursuivies par l'intéressée et sa volonté d'insertion dans la société française, il est constant que Mme A... n'a résidé en France jusqu'en octobre 2018 que sous couvert de titres de séjour " étudiant " ne lui donnant pas vocation à résider durablement sur le territoire français. D'autre part, si la SARL Caves du Languedoc Roussillon, ancien employeur de Mme A..., fait état de la nécessité de la recruter à nouveau sur le poste d'assistante commerciale afin de ne pas remettre en cause les relations commerciales que cette société a nouées avec le marché chinois et soutient que l'exécution de l'arrêté en litige entraînera de graves difficultés économiques de nature à obérer le résultat global de la société, il n'est, en l'état de l'instruction, ni démontré que Mme A... serait seule à même de maintenir de telles relations commerciales avec une partie des clients de cette société ni établi que le départ de cette salariée serait de nature à créer des difficultés d'une particulière gravité pour la société en cause. Dans ces conditions, et eu égard aux effets d'un refus de séjour, les requérantes ne peuvent être regardées comme invoquant des circonstances de nature à justifier l'urgence qu'il y aurait à suspendre l'exécution de la décision rejetant la demande de titre de séjour de Mme A....
7. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de rechercher si la condition tenant à l'existence de moyens propres à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de l'arrêté préfectoral du 29 janvier 2019, est en l'espèce satisfaite, que la requête de la SARL Caves du Languedoc Roussillon et autres, y compris leurs conclusions à fin d'injonction et celles présentées en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doit être rejetée selon la procédure prévue à l'article L. 522-3 du code de justice administrative.
O R D O N N E :
Article 1er : La requête de la SARL Caves du Languedoc Roussillon et autres est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme D... A..., à la SARL Caves du Languedoc Roussillon et à la SARL Nicolas Chebille.
Copie en sera adressée au ministre de l'intérieur et au préfet de l'Hérault.
Fait à Marseille, le 2 août 2019.
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N° 19MA03551
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